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  • : Cyprine Palace
  • : "un livre sur rien, un livre sans attache extérieure, qui se tiendrait de lui-même par la seule force interne de son style" G. Flaubert
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5 juin 2016 7 05 /06 /juin /2016 15:52

C’est un village de pierre rassemblé en hôtellerie. La saison est passée. Les guerres en éloignent un moment les voyageurs. On nous a donné la maison 9. Une petite suite avec hammam privatif. Il y a une terrasse qui domine l’oued et des hauts palmiers de l’oasis. Nos bagages sont là, posés dans le couloir. Des rideaux sont tirés et les fenêtres ouvertes avec une pénombre chaude. Il y a une palle qui tourne au plafond et la climatisation est coupée. Tu as une robe brique légère avec un petit motif qui colle un peu et ajuste chaque forme. Elle est mouillée par endroit, à l’échine et à l’échancrure des aisselles tant la chaleur étouffe. Tu as la peau comme gonflée de torpeur, luisante de cette poussée mûre qui tend assez tous les tissus. Débordante à la fois et doucement molle aux masses lisses qui opulent contre des stretchs, élastiques, tissus de coton. Tu te mets pieds nus et t’appuies sur un fauteuil. Je m’approche. La température est un peu plus écrasante, à peine rafraîchie par un courant d’air qui bouge des voiles. Les pieds nus laissent une marque sur les lattes de bois de la chambre, et là, en léger décalé devant la fenêtre, se découpe dans le bois, le carré d’une trappe avec un gros anneau de fer forgé pour y fixer des chaînes ou en dégager l’ouverture. Il y a une réception le soir avec Rania dans les grandes voutes taillées de Petra. Nous sommes invités par Razan et Peter. Assez défaits et froissés par le voyage, la peau qui brille au visage et des mèches de cheveux en désordre… Je te regarde défaire ta robe que tu laisses inerte sur le lit, tu dégrafes le soutien-gorge qui dessine une marque rouge à l’attache et la culotte qui s’est un peu chiffonnée dans la raie et colle légèrement quand tu la descends et tu te retournes et tu me regardes. La première fois que je te revoie enfin nue après ces années. Tu me souris et comme un défit dans ton regard. Les seins lourds avec l’aréole dilatée par la chaleur ou le désir et qui brille, encore un peu de rouge et la peau qui marque les élastiques, le ventre un peu mou et très clair qui rayonne de son ovale parfait comme d’une Lilith d’origine sans nombril, et qui redescends vers ton pubis que tu as mis glabre et qui m’aspire. Se retenir. Tu suis mon regard avec cet éloignement qui nous a rendu si incertains et vulnérables. La peau qui bouge à peine au simple rythme du souffle. Les regards qui se tiennent. Qui se dévisagent. Je consomme soudain toute l’opulence engloutie de cette exhibition de mollesse, flaques, mamelles, lisérés de nymphes ruisselantes. Comme une offrande gonflée de vie pour monter et pulluler l’espèce. Il y a juste un pli qui fend le pubis si lisse qui suinte de sueur. Deux bourrelets de lèvres sans découpes qui dissimulent tous les froissis de la vulve. Il n’y a que le désir. Ne plus rien se dire de ces hautes gorges rouges où l’on se glisse comme entre des cuisses pour découvrir les encorbellements de ces tombes nabatéennes. Que je dévisage et qui me défait. Ce que je renonce à te dire juste saisi par l’opale doré du ventre pour mettre bas. Il y a des bougainvilliers qui courent dans les treillages de fer des moucharabiehs. Et dans la pénombre de la chambre c’est l’eau de rose qui monte des linges de bain et des draps… Je regarde tes mains qui me dessinent des parcours sur ta peau. Ce pubis épilé juste fendu et sans nymphes qui me fait bander. Exposée de nudité, les cheveux si noirs aux frisures tirées en un chignon de laque et de danseuse, nettoyée de toute autres pilosités hormis un trait noir de sourcils. Tu le vois et laisses ton doigt appuyant un peu cherchant l’humide. Tu lèves la trappe et descends les marches d’un escalier taillé dans la pierre et tu disparais dans l’ombre et une rumeur d’eau qui coule et de clepsydre. Je bande. Je défais et replis mes vêtements, j’enfile le peignoir fourni avec la chambre et descends pour te suivre. Les bruits d’eau et de gouttes à gouttes résonnent comme dans une enfilade de caves troglodytes. La chaleur est plus forte encore et l’air saturé d’humidité. Il y a des ramifications de hammam sous les suites de l’hôtel. Il y a des grilles et des clairevoies qui interdisent certains parcours et certaines caves avec piscines et vapeurs sont accessibles aux différents clients. Une lumière rouge baigne le dédalle des caves. C’est une note continue d’un ribab amazigh qui se mêle au ruissèlement souterrain. L’étuve est à son comble, il y a une vapeur qui estompe la profondeur des pièces. Tu es debout appuyée contre le mur de notre hammam. Il y a des paillettes de savon d’Alep et une douche disponible. Tu tires à nouveau tes chevaux que tu essores. Je dépose mon peignoir à côté des serviettes sur un divan de corde. Tu me regardes comme hagarde, étouffée toujours de chaleur. Le corps rapidement qui ruisselle. Est-ce une sueur générale qui ne se retient plus, ou le dépôt des vapeurs d’un espace saturé humidité ? Il y a cette dentelle au henné sur tes chevilles et les doigts de tes pieds et cette rosée qui gonfle sur tes seins lourds et gagne toute cette nudité et perle jusqu'à la mousse à tes commissures de bouches. Cet abandon aquatique où l’on devient à mesure cette eau d’oubli. Le dos contre des murs de zelliges qui dessinent des géométries compliquées. On peut se rincer par moments et par des jets trop puissants qui te font jouir quasi instantanément. Plaquée au mur toute exposée, exhibée tu suis des yeux mon regard dévorant toute cette chair intacte dont nous avons tant et tant jouis. De brun et d’ocre très clair, sans bronzage et avec une flaque mauve très sombre d’aréoles dont bandent les deux têtons de lait. Je dévisage tous les plis, aux aisselles, à l’aine, sous le poids des seins et dans ta vulve enfouie au fond du golfe d’ombre. Tant je bande que des choses coulent et que la turgescence rouge me décalotte. Il y a aussi des plaques de métal au plafond avec des affusions de vapeurs de pluie. Comme l'impression de fuir et de s’essorer de cet encombrement de tout qui nous salît et nous retient. Comme un lavement qui remonte de l’anus éventrée et au souffle qui suffoque. Comme un lâché de pleurs ininterrompus avec l’incontinence de nous. Devenus liquides et immobiles dans cette étuve en attendant notre dévoration comme en rut d’une grotte d’avant les hommes. Économiser ses gestes dans cette torpeur des vies de désert. Je regarde aussi ta bouche qui cherche l’air. Le regard si doux de tant de voracités. Je me souviens de nos nuits et de ce dont nous aurions aimé ne pas garder de souvenirs, toute honte bue. Est-ce que tu vas te retourner, te plier lentement en callant bien écart tes deux jambes et l'échine courbée qui se tient prête. Rien qui ne retienne cet espèce de flux de sueur sans retenue. Les sphincters et les muscles sans plus de ressort. Un écoulement ininterrompu de nous jusqu’à la propreté d’une eau limpide qui nous dissout. Des odeurs fortes noyées dans l’écœurements des roses. Tes belles lèvres qui rutilent et tes yeux noircis de khôl. Et puis qui bavent comme des pleurs d’abandon de renoncer à toute dernière tenue. Combien de temps ne plus tenir encore avant d’aller ressaisir tout cet abandon dans des bains glacés ou bouillant. J’ai des images qui m’encombrent. Debout contre les carrelages sur le mur en face de toi. Nous ruisselons face à face. Turgides. Luisant comme d’une huile sueur qui nous emmêle et nous dilate, peut-être comme des poulpes de Picasso et leurs doigts chez Hokusai, s’entre pénétrant en dilatant toutes les lèvres violacées des pourtours. Et soudain des bras entiers, des jambes entières qui viennent se fouailler des entrailles, la visque douce des intérieurs, les gestes ralentis d’une lutte aquatique. Ne pas bouger à mesure que prolifèrent les fantaisies. Il y a juste ces nouveaux jets puissants et chauds qui sortent du sol. Tu avances à peine, écartes un peu les jambes et laisses le bord du jet venir frapper juste à l’œil de la vulve et tu jouis encore sans retenue, en cascades, quasi instantanément. Je me souviens de ces années dans les jardins des Oudayas. Hasnae avant ses années à Boston. Comme une voracité qui se détache. Tu ne dis rien. Ces vies où l’on se sculte un répit. Ce que tu cherches et dont tu ne dis plus rien. Les nuits pour y croire et le dégoût de n’y parvenir. Se recroiser ici à Aman et décider cette fuite vers Petra. Juste un filet d’eau dans l’étouffement des pierres. Y croire encore. Que nous pourrions cesser de fuir. Ou cesser de penser qu’un assemblage d’hôtels tiendraient lieu de vie juste. Tu as déjà callé tes avions pour lundi. Comme les marques de lutteurs dans un combat de graisse et de boue. Restez là debout l’un face à l’autre à économiser les gestes. Déplier les deux épaisseurs cirées des grandes lèvres, y venir poser la langue dans l'écoulement ininterrompu de tout. Figés comme des olisbos, gaude mihi et érections de salpêtre des gouffres phréatiques. Il y a des jardins statuaires où nos ventouses de mollusques abasourdies de faim se figent dans la pierre. Et il y a la résorption liquide de nos masses molles devenues spongieuses et aquatiques. Je regarde éclore ton immense méduse rose qui ouvre ton ventre à mesure d’orgasmes et de dilatations chaudes. Je peux y déposer la langue en lapements vifs, le doigt qui te lisse, les doigts, la main qui te fouille jusqu’aux strilles roses des fonds de vagin. Les bués des hammams qui obsèdent notre vue à n’en faire plus que cette immense ouverture de toi sans encore que nous nous rapprochions l’un de l’autre. Aura-t-on disparu de jouissances et d’éjaculations avant même d’avoir rapproché nos mains. Entre le détour sans fin qui envahit la bouche de scènes sans cesse compliquées et la douceur de la peau que les doigts touchent jusqu’à s’y noyer avec des pierres attachées aux tissus dont on ne remonte pas. Ecrire de l’eau trouble dont le sens n’est plus que la dilation de la vulve que fouille le gland au bord du sperme en le retenant jusqu’au plus loin que nos vies y seront parvenues. Les connivences sans espoir de nos vies discontinues. La grande légèreté de croire encore aux bonheurs qui ne viennent pas. Passer le temps à se faire tour à tour, plante, eau, roche de nos coïts mammifères. L’ébahissante beauté de ta sueur nue devant moi et qui en gonfle toutes les mollesses vulnérables quand ton regard avec satisfaction me voit ployer. Les ramifications d’eau de cet hôtel et de ses bains et le craquement des pierres dans la torpeur. De cet excès qui de nos cœurs fera de battre cesser.

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